spacieux refuges dans la forêt – la presse – août 2014

La Presse | Nathaëlle Morissette | Édition du 23 août 2014, section MAISON

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SAINTE-MARGUERITE-DU-LAC-MASSON — On pourrait l’appeler la maison aux six foyers. Un surnom qu’il aurait été impossible d’utiliser il y a trois ans pour définir le petit chalet de 800 pi2, rongé par la pourriture qui était situé sur le magnifique terrain en bordure du lac des Îles à Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson.

Habitant à Ottawa, l’artiste peintre Gordon Harrison et son conjoint Philippe Émond rêvaient de venir s’installer dans ce petit coin des Laurentides, là où M. Harrison avait passé son enfance. Ils décident alors d’acheter un petit chalet – dont les plafonds faisaient à peine 7 pi – en raison de la vue qu’il offrait. Le matin, installé à l’îlot de la cuisine, on peut assister au lever du soleil, alors que le soir, assis à la table de la salle à manger, c’est son coucher qu’il est possible d’admirer. Pour ajouter au paysage, la véranda qui fait face au lac offre également une vue sur de petites îles inhabitées. Avec pareil paysage, il n’en fallait pas plus pour les charmer.

Histoire d’adapter l’endroit à leurs besoins et d’aménager un atelier pour Gordon Harrison, M. Émond dessine des plans visant à ajouter des annexes au chalet déjà existant. « C’est là que le party a commencé, raconte en riant Philippe Émond, accoudé à son îlot de cuisine. L’entrepreneur, après avoir enlevé l’isolation, nous avise que tout est pourri et que ça coûterait moins cher de mettre le chalet par terre et d’en construire un autre. C’était comme un rêve qui s’écroulait. »

Déçu, mais déterminé, M. Émond accepte de recommencer à neuf, mais à une seule condition : il veut conserver le foyer d’origine.

Or, comme un malheur n’arrive jamais seul, une autre tuile s’abat sur leur projet : lors du dynamitage, le fameux foyer est réduit en poussière, avec le reste. Le couple va tout de même de l’avant. Il décide de conserver de l’ancien chalet deux vieilles portes qui seront ensuite réutilisées comme tête de lit dans l’une des trois suites.

S’engagent alors des travaux qui dureront trois ans et qui mèneront à la naissance de leur gîte et d’un atelier d’artiste.

« Je voulais un mélange de vieillot et de moderne, explique Philippe Émond. Je voulais que ce soit minimaliste, mais confortable. » L’expérience s’avère toutefois difficile. Le dépassement des coûts et les allers-retours hebdomadaires entre Sainte-Marguerite et Ottawa, là où se trouvaient alors leur résidence principale et la galerie d’art de Gordon Harrison, ne facilitent pas les choses.

Ouverture sur le lac

À l’intérieur, Philippe Émond voulait un concept ouvert avec beaucoup de fenêtres. Que l’on soit dans la cuisine, au salon ou dans la salle à manger, le décor formé par le lac et la forêt est omniprésent. Un grand foyer de pierre situé en plein centre de la maison se trouve à l’emplacement même de son prédécesseur.

Et il n’est pas seul, puisqu’on en a installé cinq autres. Au salon, dans la chambre principale, dans un séjour à l’étage, à l’intérieur d’une suite que le couple loue à ses clients, puis à l’extérieur, à proximité du spa et d’une chute d’eau que l’on a fait aménager. Une grenouille baptisée Béatrice y a même élu domicile.

L’établissement dispose de trois chambres – que les propriétaires du gîte qualifient de suites.

Deux d’entre elles se situent au sous-sol de la maison principale et disposent de grandes fenêtres donnant sur le lac. Comme nous sommes à la même hauteur que le plan d’eau, les gens une fois au lit ont une impression de flottement, illustre Philippe Émond lorsqu’il nous fait faire la visite du propriétaire. Chacune des chambres a sa propre terrasse donnant sur le lac ainsi qu’une salle de bains spacieuse avec sèche-serviettes chauffant, un gadget qui fait la fierté de notre hôte.

Les propriétaires ont aménagé leur chambre à l’étage, une sorte de mezzanine, où se trouve également une salle de bains dépourvue de porte. Histoire d’admirer le lac, peu importe ou l’on se trouve dans la maison, une autre terrasse y a aussi été construite.

La troisième et nouvelle suite, qui commence à peine à recevoir ses premiers clients, se situe dans l’autre pavillon, au-dessus de l’atelier de peinture. Le lieu de travail de l’artiste est lumineux, a de hauts plafonds et une vue imprenable sur le lac.

Bien que le train soit bien en marche et que le gîte ait déjà une clientèle assidue, Philippe Émond a d’autres projets. Lors de notre passage, une équipe de paysagistes et d’ouvriers s’affairait sur place, dirigée par la poigne de fer de M. Émond. C’est qu’il fait planter une rangée de bouleaux noirs le long de l’allée que doivent emprunter les voitures pour se rendre à la maison. D’autres pierres seront également ajoutées sur le terrain. À la fin de la rencontre, le sympathique propriétaire nous a chaudement salués pour ensuite lancer : « Bon, je vais aller voir ce que fait mon paysagiste. »

Vivre dans un gîte

Recevoir de la visite en permanence, préparer chaque matin des petits-déjeuners pour ses convives, avoir constamment des gens qui vont et viennent dans la maison à toute heure du jour. Voilà le lot quotidien des propriétaires de gîte. Leurs secrets ? L’amour des gens et la capacité de préserver leur intimité même lorsque la demeure bourdonne de clients.

« Le jour où je sentirai que recevoir devient un travail, ça voudra dire que c’est le temps d’accrocher le tablier et de fermer le gîte », affirme sans détour Philippe Émond, copropriétaire du Gîte et Atelier de l’artiste peintre Gordon Harrison. Il assure ne jamais se sentir envahi, même lorsque la maison est pleine de clients. Tous les étages de leur demeure de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson sont accessibles aux clients que M. Émond se plaît à appeler ses « invités ». « On ne veut pas qu’il y ait de murs ou de barrières. »

Il admet toutefois que son conjoint a parfois besoin d’intimité pour créer. Pour plus de tranquillité, il lui arrive souvent de se retirer dans son atelier, situé dans un autre pavillon. Ce qui ne l’empêche pas parfois de s’arrêter le temps de café avec un client intéressé par son art.